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THE LANCET : Définition et critères diagnostiques de l'obésité clinique

Definition and diagnostic criteria of clinical obesity (Lancet Diabetes Endocrinology, 14 jan 2025).

 

Les recommandations proposées ont fait l’objet d’un large consensus parmi ses membres (niveau d’accord compris entre 90 et 100%), et ont été approuvées par 75 organisations dans le monde, dont des sociétés savantes et des organisations représentant les patients.

Martine Laville (Lyon, autrice du rapport « Mieux prévenir et prendre en charge l’obesite en France »), Karine Clément (Paris, Présidente de l’ Association Française d'Etude et de Recherche sur l'Obésité ) François Pattou (Lille, Président de la Société Française et Francophone de Chirurgie de l'Obésité et des Maladies Métaboliques) ont été les membres français de cette commission.

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Quand l’obésité devient une maladie

 

Une commission internationale propose une refonte du diagnostic de l’obésité, ne se limitant plus à l’indice de masse corporelle pour définir à quel stade l’obésité devient une maladie

 

Une commission réunissant 58 experts de différents pays et spécialités médicales et des patients en situation d’obésité, alerte sur les chiffres alarmants d’obésité dans le monde. Sa prise en charge se heurte à de nombreux écueils, à commencer par l’indice de masse corporelle (IMC) utilisé pour définir l’obésité. Mal adaptée, cette définition pénalise les approches de soins. Le but de cette commission a été d’élaborer un consensus à partir de données probantes actualisées. La commission définit l’obésité comme une maladie chronique, systémique, liée à un excès d’adiposité dans de nombreux organes et tissus dont les fonctions sont altérées, avec ou sans anomalie de distribution ou fonction du tissu adipeux lui-même. Ses causes sont multifactorielles et incomplètement comprises. Les lésions des organes atteints sont à l’origine de complications graves, métaboliques (diabète), cardiovasculaires, vasculaires cérébrales, rénales, de cancers et d’une mortalité proportionnelle à la masse grasse. L'obésité préclinique répond à une adiposité excessive sans atteinte clinique, mais avec le risque d’évoluer vers l’obésité clinique et ses complications.

La distinction entre obésité préclinique et clinique est nécessaire tant en termes de prise charge clinique que vis-à-vis des politiques de santé menées. L’IMC est utile pour évaluer le risque épidémiologique et à des fins de dépistage. Supérieur à 40 kg/m2, il peut suffire. Lorsque l’IMC est compris entre 25 et 40 kg/m2, le diagnostic d’obésité nécessite la mesure directe de la graisse corporelle si elle est possible ou au chiffrage de paramètres anthropométriques (tour de taille, rapports taille/hanches, tour de taille/hauteur) selon des méthodes validées et des seuils adaptés à l'âge, au sexe, à l'origine ethnique. Pour parler d’obésité clinique, il est nécessaire de démontrer l'un ou l’autre de deux critères principaux : l’atteinte fonctionnelle d’un organe ou tissu due à l'obésité (signes cliniques, fonctions d’un ou plusieurs tissus ou organes), ou la réduction significative d’activités quotidiennes, ajustées à l'âge : mobilité, activités quotidiennes (toilette, habillement, continence, repas). Les sujets atteints d'obésité clinique devront bénéficier d’un traitement de l’obésité et des atteintes cliniques associées fondé sur des niveaux de preuves probants afin de prévenir la progression vers des atteintes irréversibles. Ceux atteints d'obésité préclinique devront bénéficier d’une prise en charge associant des conseils de santé, un suivi médical et éventuellement un traitement destiné à réduire le risque d’évolution vers l’obésité clinique et les maladies associées en fonction du risque individuel de chacun.

Les décideurs politiques et les autorités sanitaires devront assurer aux sujets atteints d'obésité clinique et à ceux atteints d'obésité préclinique un accès équitable à une évaluation diagnostique, un suivi et des traitements adaptés au niveau de risque individuel par des professionnels ayant reçu une formation adaptée. Les stratégies de santé publique visant à réduire l'incidence et la prévalence de l'obésité au niveau de la population, doivent être fondées sur des preuves, non des hypothèses infondées associant l’obésité à une responsabilité individuelle. Les préjugés liés au poids et la stigmatisation qui en résulte sont des obstacles aux efforts de prévention et de traitement efficace de l'obésité.


Redéfinir l’obésité : faire progresser les soins pour une vie meilleure

The Lancet Diabetes & Endocrinology , vol. 13 , n° 2

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