L’endoscopie est-elle une spécialité ou un outil ?
Comme vous le savez, des chirurgiens, principalement bariatriques, ont débuté une activité d’endoscopie dite chirurgicale. Ces initiatives n’ont pas été sans une levée de bouclier des gastro-entérologues. Pour faire suite aux allégations provocantes de certains gastro-entérologues par le biais de leur société savante, et sans entrer dans une polémique stérile et désuète, nous apportons, au nom de la SOFFCO-MM des précisions sur l’activité d’endoscopie par les chirurgiens.
Les chirurgiens peuvent-ils réaliser des endoscopies : La réponse est définitivement oui.
L’endoscopie n’est pas une spécialité mais un outil pour traiter des patients.
La définition d’un endoscope est assez simple : « Tube optique muni d’un dispositif d’éclairage, destiné à être introduit dans une cavité du corps humain pour l’examiner ». Il n’est pas fait mention de spécialité. On peut disserter sur le caractère souple ou rigide de l’endoscope.
L’usage de l’échographie pour poser une voie centrale avec plus de sécurité, ne fait pas de son utilisateur un radiologue. L’usage d’un marteau ne fait pas du menuisier un « marteaulogue ».
A ce titre, il serait d’ailleurs assez réducteur de limiter la spécialité de gastro-entérologue à l’utilisation d’un endoscope.
Maitrise de l’endoscopie par les chirurgiens :
Historiquement les chirurgiens avaient déjà une maitrise de l’endoscopie lors des cholécystectomies par voie ouverte et l’utilisation de la cholangioscopie per opératoire.
La maitrise de la laparoscopie par les chirurgiens est bien établie, la laparoscopie n’étant en définitive que l’examen de la cavité abdominale par un endoscope. Pour mémoire, la laparoscopie était utilisée par les hépatologues pour l’examen du foie sans que les chirurgiens n’y voient la moindre agression dans leur domaine professionnel.
Dans l’univers thérapeutique des autres spécialités, l’usage d’un endoscope n’est pas limité à un exercice défini. L’endoscopie est utilisée par les orthopédistes, les urologues, les ORL, sans agression par les rhumatologues ou les néphrologues.
Enfin si l’on élargi la vision au reste du monde, l’endoscopie est utilisée par les chirurgiens dans de nombreux pays.
Sur la formation des chirurgiens :
Formation des Internes : L’endoscopie chirurgicale fait partie de la formation des internes de chirurgie, et est inscrite dans le programme. Les difficultés rencontrées par les internes de chirurgie se portent sur la pratique de l’endoscopie avec un blocage incompréhensible de certains enseignants de gastro-entérologie.
Formations des chirurgiens en exercice : Il existe une formation de très grande qualité sous l’égide du Pr Silvana Peretta à l’IHU de Strasbourg. De plus en plus de stages validant sont proposés.
Cette formation, par expérience, permet aux chirurgiens bariatriques d’acquérir la maitrise du geste et d’offrir aux patients une très grande qualité de prise en charge.
La SFED souhaiterait une formation de 5 ans pour ces chirurgiens. C’est ignorer les capacités des chirurgiens à réaliser des actes de haute technicité en endoscopie. La maitrise des actes complexes telle que pose d’une endoprothèse, suture endoscopique demande beaucoup moins de temps pour un chirurgien. Cette maitrise peut s’acquérir en 1 an.
La SOFFCO-MM propose de sécuriser la formation des chirurgiens par des stages et accompagnement en début d’activité.
Utilité de l’usage de l’endoscopie par un chirurgien.
Historiquement, l’usage de la laparoscopie était l’apanage des hépatologues, puis des gynécologues. S’il n’était pas venu à l’idée du Dr Mouret d’utiliser un endoscope pour enlever la vésicule en 1989, la laparoscopie n’aurait pas connu l’essor actuel pour le plus grand bénéfice des patients.
Le service rendu au patient doit rester la motivation principale du médecin et du chirurgien.
Dans son exercice quotidien, le chirurgien rend visite une à plusieurs fois par jour à son patient en fonction du degré de gravité de celui-ci.
La gestion d’une complication de chirurgie telle que fistule sera de bien meilleure qualité si elle est effectuée par une équipe chirurgicale, qui sait gérer l’urgence, surveiller le patient, a une vision endo et extra luminale, et connaitra mieux la stratégie globale pour la fermeture de cette fistule.
Sur le traitement de l’obésité, et spécifiquement le traitement endoscopique de l’obésité, il s’agit d’un outil thérapeutique dans l’arsenal bariatrique global, que ce soit le ballon intragastrique ou la suture endoscopique.
Les chirurgiens bariatriques ont déjà identifié depuis de nombreuses années la nécessité d’une équipe pluridisciplinaire prenant en charge une maladie dans sa globalité. Soigner un patient souffrant d’obésité au début de l’évolution de sa maladie juste par un ballon ou une plicature gastrique, sans prise en charge de la pathologie dans son ensemble revient à lui proposer une aggravation de sa maladie à très court terme, et témoigne d’une méconnaissance importante de la maladie.
Le traitement de l’obésité au stade des solutions endoscopique doit faire l’objet d’une prise en charge pluridisciplinaire avec réunion de concertation que seuls le chirurgiens bariatriques savent organiser.
Menaces de la SFED :
Sur les propos de la SFED, menaçant de poursuite devant le conseil de l’ordre les chirurgiens qui utiliseraient l’endoscopie chirurgicale, la formation pour les DES en endoscopie est bien encadrée dans la maquette du DES de chirurgie viscérale, avec la spécification de la maitrise de l’endoscopie chirurgicale et du matériel lors du tronc commun.
Le conseil national de l’ordre des médecins, par la voix du Pr Robert Nicodeme en charge de la formation et compétence médicale s’est clairement prononcé : L’endoscopie n’est pas une activité réglementée, et les conseils départementaux de l’ordre se baseront sur la maquette du DES qui retrouve dans le tronc commun de la formation les abords endoscopiques et les référentiels.
Pour les chirurgiens formés après la publication de cette maquette, la justification d’une formation telle que le DU d’endoscopie chirurgicale fait partie des référentiels.
Au total,
Entamer une querelle sur l’endoscopie faite par un chirurgien ou un gastro-entérologue reste une discussion stérile et surannée.
La SOFFCO-MM peut dès maintenant démontrer la supériorité de la prise en charge endoscopique par l’équipe chirurgicale dans certains cas de figure (Gestion des complications, traitement endoscopique de la maladie obésité, …)
La SOFFCO-MM défendra jusqu’au bout ses adhérents maitrisant l’endoscopie, dans l’intérêt des patients et du service médical rendu.
Vincent Frering